Politique

Le 2e volet de mesures visant à maîtriser les coûts – prise de position

Contexte

Le Conseil fédéral souhaite freiner la hausse des coûts de la santé, et ainsi alléger la charge pesant sur les contribuables et les payeurs de primes. Pour cela, il a lancé deux paquets de mesures: le 1er puis le 2e volet de mesures visant à maîtriser les coûts. Le Parlement a assoupli de nombreuses mesures du premier volet, notamment grâce à l’intervention de la Société suisse de radiologie et d’autres sociétés de discipline. Un aspect essentiel à cet égard est la volonté du Parlement de ne pas laisser l’État définir des objectifs en matière de quantités, de coûts et de volumes. Le deuxième volet s’appuie sur les mesures du premier volet pour contribuer encore davantage à limiter la hausse des coûts de l’assurance obligatoire de soins (AOS) à ce qui est «médicalement justifiable».
Dans son message au Parlement, le Conseil fédéral indique que les économies prévues avec ce deuxième volet de mesures ne peuvent pas être chiffrées. Le gouvernement a en outre renoncé à présenter une analyse d’impact qui aurait permis de mettre en lumière de façon transparente les effets de ces mesures d’économie dans tous les domaines. L’efficacité, ne serait-ce que sur la hausse des coûts, de ce second volet n’est donc absolument pas démontrée, et l’impression générale est qu’il n’y a aucune visibilité sur ces mesures.

En juillet 2023, après l’examen du deuxième volet de mesures visant à maîtriser les coûts, la Commission de la sécurité sociale et de la santé publique du Conseil national (CSSS-N) s’est penchée sur chacune des mesures proposées. Sur les huit mesures initialement visées, quatre sont actuellement encore en débat au Parlement: en accord avec le Conseil fédéral, la CSSS-N s’est prononcée en faveur de modèles de prix confidentiels pour garantir l’accès à des médicaments onéreux et innovants en Suisse. Elle est aussi favorable à l’introduction de nouvelles prestations pour les pharmaciennes et pharmaciens pouvant être prises en charge par l’assurance-maladie, par exemple des prestations destinées à optimiser les traitements médicamenteux ou qui sont fournies dans le cadre de programmes de prévention. Par ailleurs, la commission a approuvé les propositions du Conseil fédéral relatives à la fixation de tarifs de référence pour les hospitalisations hors canton et à la transmission des factures sous forme électronique. Un autre point important a été la promotion de l’utilisation de la carte d’assuré numérique: l’administration été chargée de procéder à quelques clarifications à ce sujet.

La CSSS-N réexaminera le texte en août 2023 afin qu’il puisse être présenté lors de la session d’automne du Conseil national.

Contenu

Dans son avant-projet mis en consultation, le Conseil fédéral avait prévu, d’une part, de fixer des objectifs en matière de coûts pour la Confédération et les cantons et, d’autre part, de mettre en place des premiers points de contact obligatoires pour les examens médicaux. Ces dispositifs auraient rendu la consultation de spécialistes plus difficile et, au final, fortement restreint le libre choix du médecin. Devant le résultat très défavorable de la consultation, le Conseil fédéral a désormais abandonné l’idée des premiers points de contact; il a également éliminé la fixation d’objectifs de coûts du deuxième volet, mais pour en faire une contre-proposition à l’initiative du Centre pour un frein aux coûts. Le Parlement est intervenu à ce sujet pour s’assurer que l’atteinte de ces objectifs de coûts, qui devraient être définis par les fournisseurs de prestations, ne puisse pas être contrôlée par des sanctions de la Confédération et des cantons.

Analyse

L’examen du message relatif au deuxième volet de mesures révèle de nouveaux excès de la part du Conseil fédéral. Comme pour le premier volet, le Parlement a beaucoup à faire pour corriger le tir:

  • De façon générale, il n’est pas souhaitable de transférer plus de responsabilités à la Confédération et aux cantons et de créer ainsi de nouvelles compétences. C’est aussi pour cela que la mesure concernant les réseaux de soins coordonnés n’aurait pas été judicieuse. Loin d’atteindre l’objectif principal, qui est de freiner l’augmentation des coûts de la santé, elle aurait même engendré des coûts supplémentaires. En outre, ces réseaux sont depuis longtemps une réalité. Aujourd’hui déjà, dans le cas de pathologies complexes, l’intervention de plusieurs fournisseurs de prestations est sollicitée pour optimiser la qualité de la prise en charge, les fournisseurs de prestations étant d’ailleurs en principe libres de s’associer sous cette forme.
  • La nouvelle compétence que le ministre de la Santé Alain Berset propose d’attribuer au Conseil fédéral, à savoir l’évaluation des prestations de santé selon des critères d’efficacité, d’adéquation et d’économicité (EAE), n’améliore ni l’efficience ni la qualité des prestations médicales. La définition des critères EAE deviendrait ainsi du ressort de l’État – ce qu’il faut refuser à tout prix. En effet, c’est aux fournisseurs de prestations qu’il appartient de définir ces critères.

Conclusion: une hausse des dépenses et une extension outre-mesure des compé-tences étatiques

Les mesures annoncées et proposées par le Conseil fédéral dans son deuxième volet de mesures ne permettront pas de freiner la hausse des coûts: elles entraîneront en revanche un surcroît délétère de la charge bureaucratique, sans pour autant améliorer la qualité intrinsèque des prestations médicales – et donc sans parvenir à faire baisser les coûts. À l’heure actuelle, le Parlement travaille de façon pertinente à alléger ce paquet en supprimant ou en recalibrant certaines mesures inutiles.

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